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La sophrologie est-elle un placebo ?

Effet placebo et sophrologie

Dans un formidable et toujours très pédagogique reportage paru sur Arte, Emmanuelle Sapin et Pascal Goblot, nous interpellent sur le fait que, longtemps décrié, l’effet placebo apparaît désormais comme une option thérapeutique sérieuse. La sophrologie, qui fonctionne notamment selon le principe de l’action positive, peut-elle être comparée à un placebo ? Dans le n°17 de la revue Sophrologie, Odile Sendra, sophrologue, psychologue et coach, fait le point. Passionnant.

« Est-ce faire injure à la sophrologie que de l’associer à un placebo ? Pas si sûr… Dans le langage courant, parler d’effet placebo a souvent une connotation péjorative voire méprisante comme s’il s’agissait d’un effet de l’imagination, d’une simple vue de l’esprit.

Mais qu’est-ce au juste qu’un placebo et de quoi parlons-nous quand nous évoquons un effet placebo ?
Au sens premier du terme, un placebo est une préparation présentée sous la forme d’un médicament mais dépourvue de substances actives, ne contenant que des produits neutres. Il peut néanmoins engendrer ce qu’on appelle un effet placebo. Ce dernier est défini comme l’écart positif entre le résultat constaté sur l’état d’un patient suite à l’administration du placebo et l’effet thérapeutique prévisible en fonction des données de la pharmacologie. Généralement le patient n’a pas conscience de la substitution et pense recevoir un traitement actif. L’effet placebo est constaté et utilisé depuis très longtemps. Ainsi, les médecins de l’Antiquité n’hésitaient pas à prescrire des toiles d’araignée. Il est décrit par Montaigne dans ses Essais en 1680 :un marchand à Toulouse, souffrant de coliques néphrétiques se trouve soulagé par des lavements régulièrement administrés par un médecin qui en fait… ne lui injecte rien.

De nombreuses expériences dans le domaine médical prouvent l’efficacité de l’effet placebo. Cet effet a été vérifié lors d’études scientifiques menées sur de larges échantillons avec groupe test et groupe contrôle. L’amélioration de l’état de santé de la personne qui reçoit le placebo, est constatée dans 30% à 35% des cas. On ne note pas de différences selon le sexe ou l’âge. L’effet placebo a même été constaté chez les nourrissons affligés de toux aiguë. Les troubles sur lesquels l’effet placebo est le plus important sont : la douleur, l’insomnie, l’anxiété, le trouble panique, les allergies, les troubles gastriques et intestinaux… Tous ces troubles ont en commun d’être des symptômes dans lesquels l’élément psychologique joue un rôle important.

On constate que l’effet placebo existe même en chirurgie. Une étude attestant du pouvoir de l’effet placebo en chirurgie a été publiée en 2002 par le New England Journal of Medecine : 180 patients souffrant d’arthrose du genou ont été répartis en trois groupes après anesthésie générale : élimination sous arthroscopie des corps étrangers dans l’articulation, lavage articulaire et enfin « chirurgie placebo ». Dans ce dernier groupe les patients ont subi une petite incision cutanée sans insertion de l’arthroscope, l’instrument chirurgical. Au cours des deux ans de suivi, la chirurgie de placebo s’est montrée tout aussi efficace que les deux techniques chirurgicales en termes de douleur et sur le plan fonctionnel. La condition est que les personnes soient convaincues de l’authenticité de l’acte chirurgical ce qui pose bien sûr des question sur le plan éthique…

L’effet placebo peut aussi agir de façon néfaste, on l’appelle alors l’effet nocebo. Il a été démontré que des effets secondaires indésirables peuvent survenir suite à l’absorption d’une substance neutre ou inactive et donc parfaitement inoffensive. Cet effet se produit d’autant que la personne a une attente négative par rapport à la substance, par exemple lorsqu’elle a été particulièrement mise en garde par son médecin à propos des effets secondaires.

Comment expliquer cet effet thérapeutique réel ?

L’effet placebo est encore mal compris, c’est une combinaison d’effets psychologiques et physiologiques. Il y a deux éléments essentiels dans la réussite du placebo, c’est la confiance dans le médecin qui prescrit et le rituel de traitement. Le prix est aussi un élément important qui rentre en compte dans la légitimité du placebo. En revanche, l’effet placebo n’est pas magique. Comme l’écrit le Professeur François Chast, pharmacien hospitalier et ancien président de l’Académie nationale de pharmacie, « l’effet placebo est la conséquence biochimique d’une suggestion symbolique ».

Tous les êtres humains ont la faculté de synthétiser des substances dont leur corps a besoin. Le placebo agit comme un signal qui donne l’ordre au corps de se guérir. Si nous croyons à la guérison, nous nous donnons à nous-mêmes des plus fortes chances de guérir effectivement. Les neurosciences nous aident à mieux comprendre ce phénomène. Par exemple, il est prouvé que lorsque les patients s’attendent à recevoir un traitement en lequel ils croient, ils sécrètent des endorphines qui soulagent la douleur et différents autres symptômes. Dans ce cas, les personnes se mettent elles-mêmes dans un état propice à la guérison.

Alors la sophrologie peut-elle être associée à un placebo ?

Nous pouvons d’ores et déjà affirmer que la sophrologie n’est pas un placebo; premièrement, elle n’est pas une préparation administrée par un soignant à un patient non informé de la réalité de cette préparation. Bien au contraire ! La sophrologie a pour objectif l’autonomie des personnes et non leur dépendance. C’est pourquoi le sophrologue insiste sur l’intérêt d’une pratique régulière et en autonomie en dehors des séances. C’est aussi pour cette raison que les temps de dialogues pré et post séance pendant lesquels les sophronisants expriment leurs ressentis et mettent en mots leurs sensations sont essentiels. Ils aident les personnes à être au cœur de leur propre réalité et à être acteurs de leur démarche. On ne pourrait pas imaginer une séance de sophrologie qui se réaliserait sans que le sophronisant en ait conscience ! C’est une différence fondamentale entre la sophrologie et le placebo.
Par ailleurs, la sophrologie a un spectre d’action beaucoup plus large qu’un placebo dont l’objectif est de soulager une souffrance. La sophrologie s’intéresse à l’humain dans tous ses aspects et vise l’harmonie du corps et de l’esprit. A terme la sophrologie change notre regard sur nous-mêmes et sur le monde. Elle nous aide à trouver notre « juste » place dans l’existence.

Ensuite la sophrologie ne s’intéresse pas qu’au symptôme et à la souffrance mais met l’accent sur le positif. Elle permet au sophronisant de développer ses ressources intérieures et ainsi de renforcer toute sa structure psychique et physique. Cependant il y a des liens entre la sophrologie et l’effet placebo. Nous retrouvons dans l’effet placebo un des principes fondamentaux de la sophrologie, celui de l’action positive. Selon ce principe, chaque fois que nous avons une pensée positive, elle se répercute sur l’être tout entier, corps et esprit ; toute sensation positive que nous éprouvons et dont nous prenons conscience agit positivement sur le corps et le mental. Nous retrouvons ce principe dans l’effet placebo qui confirme que le corps et l’esprit sont une seule réalité en totale interaction à tout moment.

Enfin, il est constaté que la relation soignant-soigné est essentielle dans l’effet placebo. L’attitude du médecin et la confiance que son patient lui accorde sont déterminantes. En sophrologie, le concept d’alliance est fondamental, il inclut la notion de confiance entre le sophrologue et le sophronisant. En revanche et, contrairement à la relation médecin/patient, il s’agit d’une rencontre entre deux sujets et non pas d’une relation dominant/dominé. Le sophronisant reste actif et maître de son évolution, le sophrologue est un « passeur » qui doit à tout instant être conscient de ses limites. »

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